Nous vivons entourés de la pinède landaise et vous empruntez probablement souvent ses jolis sentiers. Mais que savez-vous de sa gestion, de son entretien et de son exploitation ? Pas grand-chose ? Cet article est fait pour vous ! Michel Laboille, propriétaire du Domaine de Millon, à Soustons, nous dit tout sur cet écosystème qui lui est cher.
Que devons-nous savoir sur la forêt landaise ?
En premier lieu, il est très important de rappeler que la forêt landaise est une forêt créée par l’homme pour assainir la terre des Landes et dont la vocation est la production, ce qui explique les coupes et les éclaircies que vous pouvez y observer. On y plante du pin maritime, car cette espèce est capable de survivre au manque d’eau et à la sécheresse l’été et au surplus d’eau l’hiver, le tout dans le sable, qui est un terrain pauvre.
Comment gère-t-on une forêt aujourd’hui ?
Un propriétaire de forêt, sylviculteur, est responsable de cet espace et doit assurer la bonne gestion de ses peuplements. Pour cela, les principales opérations sont les suivantes :
- L’entretien de la forêt
Il se fait via le débroussaillement, à l’aide d’un rouleau landais ou d’un broyeur. Le débroussaillement permet notamment de limiter la propagation du feu en cas d’incendie, d’aérer le sol et de lui apporter de la lumière. L’entretien a lieu tous les 5 à 6 ans. Ces travaux sont généralement confiés à des entreprises de travaux forestiers.
Sachez par ailleurs qu’il existe une obligation légale de débroussaillement (OLD), pour les propriétaires d’une habitation entouré de forêts (pour une maison, le périmètre à débroussailler est de 50 mètres autour du bâtiment). Si vous habitez en lisière de forêt, le propriétaire de cette forêt ne peut vous empêcher de débroussailler ; ce n’est en revanche pas à lui de payer les frais.
- L’exploitation des arbres
Depuis quelques années, le pin est utilisé en ressource bois-énergie. C’est le cas lorsque le semis naturel ou le semis en ligne a une densité trop importante et qu’il y a des arbres qui ne seront jamais marchands car chétifs. C’est le cas également pour la récupération des souches après une coupe rase (action dont Michel n’est pas partisan).
L’entretien d’une parcelle passe également par la suppression des sujets tordus, bicéphales, sans avenir qui créent une concurrence inutile. C’est ce qu’on appelle les éclaircies.
Jusqu’à il y a une cinquantaine d’années, un peuplement complanté de pins de même âge était coupé lorsque les arbres ne donnaient plus de résine. Depuis, la donne a changé et la coupe rase a lieu généralement au bout de 50 à 60 ans, quand les arbres atteignent un volume unitaire moyen de 1,200m3 (c’est ce que Michel pratique dans sa forêt). Certains sylviculteurs sont adeptes de révolutions plus courtes.
- La plantation
Après avoir laissé reposer le sol pendant un minimum de 2 ou 3 ans, les sujets coupés sont remplacés par de petits pins, plantés sur un labour auquel on apporte un engrais organique – aucun produit chimique n’est utilisé.
Que devient le bois coupé dans les Landes ?
Selon la taille et les qualités de l’arbre dont il provient, le bois peut être transformé :
- En bois énergie : sert à alimenter les chaudières biomasse dans l’industrie et certains ensembles résidentiels ;
- En bois pour la fabrication des pellets ;
- En bois pour la papeterie ;
- En bois de caissage pour palettes ou autres caisse ;
- En bois de charpente ;
- En bois de menuiserie.
La résine était un autre trésor de la forêt, qui a marqué l’histoire de Michel, puisque ce dernier est issu d’une famille de distillateurs de gemme. Malheureusement, l’exploitation de la résine a cessé en France entre les années 1970 à cause de la concurrence de la Chine et du Portugal. Pour Michel : « C’est très regrettable, car le gemmage créait des emplois, une richesse économique et perpétuait une tradition locale tout en assurant dans la forêt la présence permanente d’hommes connaisseurs de ce milieu ».
Comment prendre soin de nos forêts
Propriétaires, randonneurs, cyclistes ou encore chasseurs : nous sommes nombreux à parcourir les chemins forestiers. Quelques règles de bon sens sont donc à respecter pour préserver ce superbe écosystème.
En forêt, il est interdit :
- De fumer ;
- D’utiliser des véhicules à moteur (seuls les propriétaires, les ayants droit tels que les chasseurs y sont autorisés) ;
- De sortir des chemins existants, de creuser des bosses, etc.
Texte en exergue
N’oublions pas que la forêt n’est pas un bien commun comme beaucoup de gens l’imaginent : elle est privée à 85 % et n’existe que parce que les sylviculteurs la gèrent d’une façon optimale (la plupart des propriétaires forestiers doivent établir un plan simple de gestion agréé par le Centre national de la propriété forestière) Nous ne pouvons parcourir celles-ci que parce que les propriétaires nous y autorisent. Faisons en sorte que cela continue ! Dans les Landes, nous avons la chance que les forêts soient quasiment toutes « ouvertes ».
Les petites (et grosses) bêtes qui enquiquinent la forêt
Si la forêt est bien souvent le paradis des animaux, ces derniers ne sont tous tendres avec elle ! Les sangliers occasionnent bien entendu des dégâts dans les plantations de jeunes pins, par leurs passages indélicats au cours des premiers jours suivant la plantation. Mais les plus destructeurs sont en réalité les cervidés : en effet, les chevreuils broutent les cimes des pins mesurant jusqu’à 80 cm de hauteur, tandis que les cerfs écorcent des arbres parfois vieux de 10 ans, causant ainsi leur mort. Les chenilles processionnaires, quant à elles, retardent la croissance des arbres, mais ne les tuent pas. Elles s’implantent surtout en bordure de forêt, mais pas au cœur. Le coucou est un des principaux prédateurs de ces chenilles. Enfin, lorsque les arbres sont « stressés » et affaiblis à la suite d’une tempête ou d’un incendie, des insectes nommés scolytes les attaquent et les font mourir.
Les fléaux de la forêt ? Le feu (sachant que les incendies sont à 95 % d’origine humaine) et la tempête.
Michel et sa forêt
- Son moment préféré : le débroussaillement avec son vieux tracteur des années 1970, en prenant soin de contourner les arbousiers, les chênes-lièges, etc., afin de préserver au maximum la biodiversité, comme il l’a toujours fait.
- Son lieu favori : la forêt littorale, d’une extraordinaire diversité d’espèces et de paysages.
- Son arbre préféré : le chêne-liège, qu’il adore et protège au quotidien via l’association Le liège gascon.
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Michel Laboille est sylviculteur, conseiller au sein du CRPF (Centre régional de la propriété forestière) et président de la DFCI (Défense de la forêt contre les incendies) de Soustons.
Merci à lui pour son regard éclairé !
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